L'amour la poésie

"L’amour la poésie", ce «livre sans fin», est dédié à Gala, la compagne de Paul Eluard. Nous retrouvons dans les premiers poèmes du recueil l’inspiration amoureuse qui embrase la fin de "Capitale de la douleur". Mais maintenant, l’amour a exorcisé l’univers, conjuré les puissances malfaisantes et rendu «a confiance dans la durée». Dès lors vivre est possible, tout est possible: «Mes rêves sont au monde / Clairs et perpétuels / Et quand tu n’es pas là / Je rêve que je dors je rêve que je rêve.» Apparaissent alors quelques-uns des plus beaux poèmes d’amour de la poésie française, tel entre autres "Je te l’ai dit". Cependant, cette vision d’un monde transparent suscitée par l’amour, ne saurait, de même que l’amour, être immuable, assurée, possédée définitivement. Aussi le recueil contient-il à côté des clairs poèmes du bonheur nombre d’autres poèmes où le désespoir retrouve son ancienne puissance. Mais, au fond même de l’amertume, le poète reste constamment passionné, conscient de l’urgence qu’il y a à exprimer les révoltes encore muettes: «Entendez-moi / Je parle pour les hommes qui se taisent / Les meilleurs.»

Poète français, Paul Eluard (pseudonyme de de Eugène-Émile-Paul Grindel) est né le 14 décembre 1895 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Diagnostiqué tuberculeux, il entre au sanatorium de Clavadel, près de Davos (Suisse) où il effectuera de longs séjours jusqu'en 1914. Infirmier militaire à l'hôpital d'Hargicourt (Somme), il signe du nom de sa grand-mère maternelle, Éluard, une plaquette de vers polycopiée intitulée Le Devoir. Hospitalisé l'année suivante, il rentre à Paris et épouse Gala le 21 février 1917. En 1918, il publie les Poèmes pour la paix, inspirés par son expérience des champs de bataille de la Première Guerre mondiale. Il rejoint le groupe Dada et continue à publier des plaquettes de poésie. Il s'engage pleinement dans l'expérience surréaliste aux côtés d'André Breton puis quitte la France pendant sept mois pour un voyage en Extrême-Orient. Il milite ensuite pour une poésie plus sociale et adhère au Parti communiste. L'Amour la poésie est publié en 1929. Il rencontre René Char et Maria Benz, dite Nusch, qu'il épousera en 1934. Il publie divers poèmes, la plupart engagés. Il est mobilisé au début de la Seconde Guerre mondiale mais démobilisé en 1940 à cause de sa maladie. Il réintègre le Parti Communiste Français et s'engage activement dans la Résistance. Les avions de la Royal Air Force parachutent au-dessus des maquisards des milliers d'exemplaires de son Poésie et vérité 1942. En 1943, il anime avec Aragon le Comité national des écrivains (CNE). Il collabore au journal Les Lettres françaises et rassemble les textes du recueil L'Honneur des Poètes. À la Libération il publie une somme de poèmes et reçoit la Médaille de la Résistance. Il participe au Congrès mondial de la Paix de Mexico (1949), voyage en Tchécoslovaquie et en U.R.S.S. en 1950, puis épouse en secondes noces Dominique Lemor. Il subit une première crise cardiaque pendant l'été 1953. Suite à une nouvelle attaque, il succombe à Paris le 18 novembre 1953, à l'âge de 56 ans.